Qu’est ce que la réalité?
En me penchant sur le sujet je me rends compte que cette question l’humain se la pose depuis des siècles, non, des millénaires. Toutes les mythologies, les religions sont des tentatives d’expliquer la réalité, d’y trouver sa place et de donner du sens.
Donner du sens, c’est essentiel à l’humain….
Dans cet article je ne compte pas essayer de définir la réalité ou le réel, je n’ai pas cette présomption, mais juste d’expliquer que l’on ne perçoit pas le réel et que notre réalité, ce que nous percevons du monde, est d’une part limitée par nos sens et d’autre part en grande partie subjective.
Et c’est en partie avec ça : la subjectivité de chacun que nous travaillons en hypnose.
La vue est notre sens dominant et nous bâtissons beaucoup de notre perception grâce à ce sens qui nous permet d’appréhender la réalité.
C’est une évidence aujourd’hui, nous voyons les choses grâce à la lumière (c’est quelque chose que j’ai bien étudié en gemmologie).
La lumière, quelque chose de très particulier que cette chose, mais ne nous éloignons pas.
La lumière est une onde électromagnétique (en tout cas au moins en partie), donc des longueurs d’ondes, des fréquences, donc des rythmes et déjà là on peut comprendre que l’on ne perçoit qu’une partie de la réalité puisque lorsque je vois du rouge ou du violet, pour moi c’est une couleur mais la physique nous prouve que c’est une onde avec une longueur et un rythme, intéressant non. Peut être difficile à appréhender, mais au même titre que le son la lumière a un rythme, c’est une vibration (au moins en partie)
De cette lumière nous n’en percevons qu’une partie, ce qu’on appelle la lumière blanche composée des couleurs, chaque couleur étant une longueur d’onde , une partie de cette lumière blanche. Mais il existe toute une partie de cette lumière que nous ne percevons pas, ce qu’on appelle les ultraviolets des longueurs d’ondes en dessous de la longueur d’onde du violet et les infrarouges.
Donc le sens principal que nous utilisons pour percevoir le monde ne perçoit qu’une partie de celui ci.
Et cela est la même chose avec les autres sens, les animaux perçoivent bien plus d’odeurs que nous. Et pour notre ouïe il en est de même, il existe des infrasons et des ultrasons que nous ne percevons pas mais qui existent bel et bien. Mais avant que la science ne prouve qu’ils existent, grâce aux appareillages et à l’expérimentation pour nous cela n’existait pas et encore aujourd’hui même moi en sachant cela j’ai du mal à me dire qu’il y a beaucoup de choses qui existent autour de moi et que je ne perçois pas.
La matière, ce que je touche, ce que je suis, ce dans quoi je vis mon expérience de vie, ce qui est le composé essentiel de notre réalité n’est pas non plus que ce que j’en perçois. Une pierre n’est pas seulement cette chose solide, immobile c’est aussi dans sa structure, des atomes qui oscillent, en mouvement, des charges électriques,des forces qui s’attirent et se repoussent. Nous ne percevions pas cela avant que la science dans son évolution le montre. Et aujourd’hui la physique quantique semble montrer que dans l’infiniment petit, encore plus petit que l’atome, la matière a des comportement très particuliers qui remettent en question tout ce que l’on croit savoir de notre réalité, cela est un très vaste sujet.
Par ces exemples je voulais juste montrer que ce que nous percevons de notre réalité est limité par nos organes de perceptions, nos sens qui ne sont capables d’en appréhender qu’une partie et par nos connaissances, l’évolution des technologies permet de percevoir plus de choses; Avant le microscope on ne savait pas qu’il y avait des bactéries et des virus aujourd’hui on sait qu’autour de nous et en nous il y a des milliards de microorganismes que nous ne percevons pas mais qui font parties du réel. Plus nous aurons des technologies sophistiquées, plus nous ferons d’expériences et de calculs, plus nous percevrons de choses dans le monde, plus notre réalité se modifiera.
Alors non seulement nous ne percevons qu’une partie de la réalité et en plus notre cerveau modifie ce que nous percevons. Et oui notre cerveau, une super machine, interprète les signaux que nous recevons du monde.
Revenons à la vue ce sens dominant est facilement “dupé”
Expérience de Muller Lyer
La flèche du haut semble plus petite que celle du bas
Et bah non, elles sont identiques
Ceci prouve que notre vision est influencée par le contexte, le contexte étant les flèches tournées vers l’intérieur ou l’extérieur.
Une autre en rapport avec le contexte
Celle ci je l’aime beaucoup le cercle de gauche paraît plus petit que celui de droite et pourtant ils sont les mêmes.
Encore une fois le contexte influence la perception, je l’aime beaucoup car elle permet de faire le lien avec la psychologie, il existe le même phénomène à propos de l’estime de soi.
Il a été montré qu’un individu entouré de personnes qu’il estime “meilleures” que lui peut se sentir dévalorisé et aussi le contraire, un individu entouré de personnes qu’il estime “moins bonnes” peut voir augmenter son estime de lui.
(The Effect of Upward Social Comparison on Self-Esteem
- Auteurs : Tesser, A., & Smith, R. H. (1980).
- Journal : Journal of Personality and Social Psychology, 38(4), 591-600.
- Titre : Social Comparison and Self-Evaluation in the Context of Achievement
- Auteurs : Wills, T. A., & DePaulo, B. M. (1991).
- Journal : Journal of Personality and Social Psychology, 60(2), 295-309.
Je dis peut car cela va dépendre du système de référence de chaque individu. Je ne vais pas rentrer dans le détail de ces processus ici ce que je veux montrer c’est que nos perceptions sont influencées par le contexte et que donc notre réalité est dépendante de celui-ci.
Une autre illusion d’optique.
triangle Kanizsa.
Le triangle blanc pointe en bas n’existe pas, c’est notre cerveau qui le construit, qui le projette sur la réalité. Je le sais mais quand je regarde le triangle est bien là. C’est dingue non?
Ces illusions montrent que notre sens dominant, la vue, est très facilement trompé et qu’il ne perçoit pas toujours la réalité des choses.
Nous savons maintenant que nos perceptions sont limitées par la capacité qu’ont nos organes sensoriels d’appréhender les différentes informations qu’ils reçoivent. Nous savons que les informations reçues qui sont déjà partielles, sont interprétées par des systèmes cognitifs complexes qui ne reflètent pas toujours le réel.
Ceci est expliqué grâce au concept nommé top down et bottom up.
voici une définition de ces processus que m’a donné Bard 2023 l’IA de google ) j’y reviendrai certainement.
Processus bottom-up (ascendant):
- Définition: Désigne le traitement de l’information qui commence par les données sensorielles et progresse vers des niveaux d’interprétation plus élevés.
- Analogie: Imaginez construire une maison en commençant par les fondations (données sensorielles) et en ajoutant des briques (traitement de l’information) une par une jusqu’à la structure finale (interprétation).
Processus top-down (descendant):
- Définition: Désigne le traitement de l’information qui commence par les connaissances et les attentes préalables et influence l’interprétation des données sensorielles.
- Analogie: Imaginez regarder une maison déjà construite (interprétation) et utiliser vos connaissances en architecture (connaissances préalables) pour comprendre sa structure et son fonctionnement (données sensorielles).
Points clés :
- Bottom-up: données sensorielles -> interprétation
- Top-down: connaissances -> interprétation
- Interaction: Les deux processus interagissent et se chevauchent pour une perception et une cognition complètes.
Exemples :
- Bottom-up: Reconnaître un visage familier dans une foule.
- Top-down: Interpréter le sens d’une phrase ambiguë en utilisant le contexte.
Conclusion :
Les processus bottom-up et top-down sont deux aspects complémentaires et indissociables du traitement de l’information. Ils contribuent ensemble à notre perception du monde et à notre manière de comprendre et d’interagir avec celui-ci.
Voici un cours complet en français sur les processus bottom up et top down.
https://www.youtube.com/watch?v=j7dLtnlB_gI
Tout cela permet de dire que nous ne percevons pas la réalité dans des domaines très concrets qui sont les informations sensorielles.
Alors imaginer pour les choses beaucoup plus abstraites, comme la psychologie, tout ce qui est de l’ordre du jugement qui est beaucoup plus subjectif : perception de soi et des autres, estime de soi, interprétations des comportements, ce qui est bien ou mal, bon mauvais…. ça laisse songeur sur le concept de vérité et de réalité non?
Il est montré que les émotions influencent nos perceptions de différentes manières.
Biais attentionnel, nous détectons plus facilement les émotions qui sont congruentes avec nos propres émotions, si je suis en colère je vais plus facilement percevoir les personnes avec des expressions de colère ou et moins percevoir les personnes avec des expressions joyeuses ou anxieuses et le contraire aussi bien entendu (expérience de dot-probe).
Biais d’interprétation : nous avons tendance à interpréter les émotions que nous percevons en fonction de notre propre état émotionnel. Nous détectons très bien les signaux émotionnels chez les autres, tous les primates savent faire ça; Parfois certains signaux sont ambigus quand c’est le cas nous avons tendance à interpréter ces signaux en congruence avec notre propre état émotionnel.
L’influence des émotions sur l’interprétation des expressions faciales ambiguës » par Russell et al. (1994)
- « L’effet de l’humeur sur l’interprétation des expressions faciales » par Keltner et al. (1993)
- « L’influence des émotions sur la perception et le jugement social » par Forgas (2001)
Les émotions influencent notre mémoire, les événements avec un impact émotionnel s’inscrivent plus durablement dans notre mémoire, elles jouent un rôle dans la consolidation de la mémoire et même les émotions que l’on vit aujourd’hui peuvent influencer la perception que l’on a d’événements passés. C’est-à-dire que nous interprétons le passé en fonction de notre état actuel. Cela ajouté aux connaissances qu’apportent les neurosciences sur le fonctionnement de notre mémoire donne vraiment à réfléchir sur notre perception de notre histoire, de comment nous nous la racontons. Je ne peux développer ici au risque de faire trop long et complexe mais ça fera certainement l’objet d’un autre article.
Il est montré que nos émotions influencent aussi nos décisions, nos jugements aussi.
« The role of emotion in memory » par Phelps (2004)
- « Emotion and memory: Insights from neuroscience » par McGaugh (2004)
- « The influence of emotion on memory » par LaBar et Cabeza (2006)
De la même manière nos croyances influencent notre perception.
Il existe différents biais cognitifs qui sont bien étudiés aujourd’hui. On appelle biais cognitif, une distorsion systématique de la pensée logique dans le traitement de l’information.
Il y en a un gros que l’on appelle le biais de confirmation. Nous avons tendance à rechercher et à percevoir les informations qui confirment nos croyances et à occulter les informations qui les contredisent.
On appelle ça parfois le syndrome de la voiture jaune : vous avez vu une superbe voiture jaune et vous voulez l’acheter et bizarrement les jours suivants vous voyez des voitures jaunes partout ou le même modèle que vous voulez acheter, coïncidence synchronicité, l’univers vous envoie un message? Peut être, ou peut être est ce le biais de confirmation qui lui est prouvé, il n’y a pas plus de voiture jaune ou de voiture du modèle que vous voulez acheter juste votre attention est focalisée sur cette voiture et vous les remarquez plus.
Nos croyances, nos expériences “manipulent” notre attention et donc filtrent la perception que nous avons de la réalité.
Un autre biais important en rapport avec les croyances est le biais d’interprétation, nous avons tendance à interpréter les événements en fonction de nos croyances. L’exemple souvent cité est celui des fantômes. Une personne qui croit très fortement aux fantômes aura beaucoup plus vite tendance à interpréter des bruits étranges chez lui comme étant des bruits de fantômes, une personne qui pense qu’il y a beaucoup de voleurs dans la région aura beaucoup plus tendance à interpréter ces mêmes bruits comme une intrusion de ces malotrus plutôt que des fantômes.
Il existe d’autres biais cognitifs et d’autres facteurs qui influencent nos perceptions de la réalité mais je vais m’arrêter là cet article étant déjà long. Il me semble que par ce billet je montre que notre cerveau ne perçoit pas complètement la réalité, qu’il a des outils (sens) qui sont limités dans leur perceptions et qu’il interprète voir même reconstruit une partie de ces perceptions; Notre perception du monde est subjective. Pourquoi notre cerveau fait cela pour 2 choses un gagner du temps (on parle en milliseconde mais dans un monde dangereux quelques millisecondes peuvent nous permettre de survivre, tout notre corps à cette volonté puissante qui anime tout le vivant de survivre. La deuxième raison est que le monde dans sa globalité est bien trop complexe pour notre petit être et le cerveau le simplifie pour pouvoir en faire une expérience.
Et pourquoi cet article dans un blog d’hypnose? car c’est en partie avec cette subjectivité que l’on va travailler dans un accompagnement hypnotique; car notre perception de nous et du monde peut être la cause des problèmes qui nous font nous rendre chez un praticien en hypnose, c’est même souvent notre façon de percevoir, de raconter notre histoire; nos croyances qui sont un frein dans notre équilibre ou à nos objectifs
Nous savons que ces perceptions sont modifiables puisque subjectives et les états d’hypnose qui permettent de rencontrer et modifier nos processus inconscients sont vraiment des espaces propices à changer notre subjectivité pour plus d’harmonie, de fluidité, de stabilité.
Il y a ce sacré Saint thomas qui disait : “Moi, je crois ce que je vois!”. et l’autre de lui répondre “je vois ce que je crois” .
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